Il pleut sur ma tronche
et je passe 20 heures par jour
dans une piaule dénuée de vie
et les insectes salauds m’ont déjà ravagé le cœur
ma raison s’est fait la malle
comme si la merde me sortait
par les oreilles
il pleut sur ma tronche
et je ne sais pas travailler
je sais à peine aimer
mes journées sont blindées d’ennui
et de solitude
les femmes sont si délicieuses
mais si rares
il pleut sur ma tronche
et mes droits d’auteur me payent
juste assez de pisse
pour me ronger le foie
doucement
pour me laisser vivoter
pour me laisser mourir
il pleut sur ma tronche
et tous les mendiants de la ville me connaissent
et j’ai déjà saigné sur le trottoir
seul sous la nuit
seul sous cette lune
inaccessible
il pleut sur ma tronche
et je pense à tous ces enfoirés
qui me snobent et baisent
les plus belles salopes
et leurs écharpes en soie
et leurs mocassins dorés
il pleut sur ma tronche
et je pense à tous les amours
que j’ai laissés mourir
par manque de courage
par faiblesse
par manque de joie et
de tendresse
il pleut sur ma tronche
et le soleil revient tous les matins
et n’a aucune pitié
assassinant tout espoir
assassinant mes rêves
et se moquant de mes gueules
défoncées
il pleut sur ma tronche
et je tente malgré tout de briller
comme une bombe qui hurle avant de ravager le monde
comme un enfant mort à la guerre
comme une nuée de cadavres tombés du ciel
comme un séisme
il pleut sur ma tronche
et je chante toujours seul
et je bois la pluie
comme les larmes d’une vierge
coulant dans la bouche
comme du sucre
et du miel
il pleut sur ma tronche
et il n’y a rien d’autre à faire
que de se foutre à poil
et gueuler sur le monde
faire un clin d’œil au désespoir
et jouir sous la pluie
il pleut sur ma tronche
et les murs ne contiennent que du vide
et j’ai piétiné tout ce qui faisait ta beauté
et des loups affamés meurent dans le ciel
en chantant un Notre Père
et tout s’éteint à chaque seconde
il pleut sur ma tronche
et il faut tant de courage
pour oser vivre
et le froid de l’hiver n’a jamais valu
une bonne pipe
et des types bossent
huit heures par jour
avec le sourire
il pleut sur ma tronche
et je remplis un cahier entier
d’âneries inutiles
et le sang de la terre est une bite tranchée
qui demande pardon
et j’aimerais m’excuser parfois
à tout le monde
mais ne le fais jamais
il pleut sur ma tronche
et je n’ai pas souri depuis 10 ans
et la passion est un nénuphar noyé et dévoré
et je suis fatigué
dix heures par jour
et chaque minute pèse plusieurs tonnes
il pleut sur ma tronche
et le bonheur n’a aucune importance
et seule compte la guerre
et la défaite importe peu
il pleut sur ma tronche
et je pense à des oiseaux morts
à des jours sans alcool
à des semaines sans ivresse
je pense à des vies entières
sans femme ni passion
sans gloire ni lumière
je pense à l’enfermement de l’esprit
au pourrissement du corps
à la folie usée
je ne pense à rien
il pleut sur ma tronche
il pleut
des femmes seules et désespérées
il pleut
des cris d’orgasmes féminins
en pleine nuit
au milieu des toits
il pleut
des érections solitaires et misérables
il pleut
il pleut sur ma tronche
et des pigeons cons et malheureux
se réfugient sous des gouttières
et rien n’a d’importance
il pleut
il pleut sur ma tronche
il pleut des envies soumises
et des désirs éteints
il pleut
il pleut
et j’espère que
demain
se lèvera
un soleil nouveau
il pleut
des soleils
et des joies éternelles.
Il pleut
et je garde le sourire
malgré tout
il pleut.